Thursday, December 14, 2006

“Vous n’avez rien compris”

“Vous n’avez rien compris” Ce sont les mots que j’entendai un samedi soir comme les autres, un samedi soir où l’un d’entre nous, sous les effets de l’alcool, perdait sa langue et sa raison. Mais comme l’alcool mène aussi à dire ses vérités, considérons l’argument. Car les guerres ne se déclenchent-elle pas après une misérable incompréhension ? Au vu(e?) de deux des textes de la semaine dernière, le troisième n’a vraisemblablement pas tant apprécié l’expérience en question, même s’il a sans doute eu des sourires par moments. Pourquoi pas ? Parce qu’il n’y voit qu’un tissu d’absurdités, un flow inconscient, une écriture semi-automatique qui n’a de sens ou d’apport que d’exploiter sommairement la psychologie de l’auteur. En fait, la véritable indignation de notre ami venait du fait que les deux autres compères aient fait une référence au « classicisme » de son texte, un mot sans doute inapproprié mais qui aurait – je le pense toujours – pu être aisément ‘compris’ par ce dernier dans le sens où on l’entendait. Hors ce n’est ni le lieu ni le moment de se faire abattre par ces fébriles incompréhensions, de se perdre dans des champs de bataille lexicale, ou des champs de bataille lexicaux. GET IT Ce dernier rétorqua donc, amèrement, que les deux textes en question étaient tout autant ‘classiques’ que le sien, mais dans le genre de l’absurdité. Soit, mais cela ne nous aide pas davantage : c’est plutôt une perte de temps lorsque la bile s’évente sur des constats de la plus haute évidence. Mis à part la définition de l’absurde, qui elle aussi demanderait davantage de réflexion (voir le PS et une définition de Kenneth Burke pour la notion d’absurdité), analysons. “Chaque création d’art n’est qu’un reflet d’une conception de la vie à une perception donnée.” Alors, pour peu que vous acceptiez cette définition, pleine d’articles indéfinis, comment peut-elle nous aider? C’est dans cette définition que se terre le véritable noeud de l’argument. Car le débat n’est pas de savoir si l’on écrit du classique, du nouveau, de l’à-cheval, du rien du tout, etc… Nous connaissons nos limites, nous ne craignons pas l’imagination, nous essayons à notre façon de pousser sur certains murs, ou pas. Non, je pense que nos avis ont divergé sur quelque chose de beaucoup plus fondamental qu’un terme qui se limite à catégoriser des choses qui, nous le savons, souffrent de la catégorisation. La différence affichée, voilà pourquoi elle est si intéressante, relève de notre conception de l’art, et donc, selon la définition ci-dessus, de notre conception de la vie. A une perception donnée. Que l’autre s’accorde avec cette perception, ou au contraire s’en éloigne : il n’y a rien de plus normal. Après tout, cette relation entre deux perceptions dépend de nombres de facteurs que nous ne pouvons pas contrôler. Et c’est là la richesse de l’art, de l’ouverture qu’elle permet, voire plus, qu’elle engage chez le spectateur-lecteur-percepteur. Voilà ce que je veux dire : la richesse et l’ouverture de notre entreprise réside dans notre propre capacité à tirer le maximum de cette relation entre perceptions. Ce n’est en fait jamais vraiment un jugement morale ou esthétique. “Vous n’avez rien compris.” Et puis, c’est vrai, si je suis poussé à écrire ce texte – je vous remercie de votre courage si vous avez persisté jusqu’ici – c’est aussi par bile impétueuse, parce je suis choqué que l’un d’entre nous puisse, même si c’est sous l’influence, et surtout parce que c’est sous l’influence, bref, que l’un d’entre nous engagé dans cette aventure collective puisse faire preuve, non seulement de ce manque de tolérance, mais surtout d’une vision aussi simpliste et irréfléchie. C’est justement parce que nos conceptions de l’art, de la vie, de nous et de l’autre, sont différentes, que nous pouvons, non, que nous devons, comprendre. Il n’y a ici que de place pour l’incompréhension, aucune pour celui qui ne l’accepte pas. PS : si vraiment nous nous bornons à vouloir nommer et classifier ces textes, et je me réfère plus au mien qu’à celui de Flo dans ce cas-ci (libre à lui de le catégoriser comme il le souhaite), il s’agit d’un procédé fort répandu aujourd’hui, ‘classique’ en ce sens, qui relève de l’association d’images comme forme de narration. Cf. plusieurs auteurs, j’ai les mêmes difficultés que d’habitude à les « nommer ,» mais entre autres Inès – théâtre ? PS 2 : Je n’en garde rien de personnel, vous le savez, essayez de considérer ceci comme un développement de notre vision plutôt qu’une attaque. PS 3 : J’ai pressé un peu l’argument sur la fin parce que je vais déjeuner, et oui. Ça ne demande qu’à pousser.

2 Comments:

Le Collectif said...

j ai publie ca trop vite, c'est pas ines, mais je vous retrouverai le nom d ici peu

Le Collectif said...

Irene Fornes pour la forme narrative, entre autres.

s